La boîte de nuit

Bienvenue

Cette page se veut un inventaire fluctuant de ce qui se trouvera dans la Boîte de Nuit.

Cette boîte (car ce sera une vraie boîte, un coffret, autrement dit) est un projet qui mûrit depuis longtemps. Il prendra sûrement des années à aboîtir, mais commence à se réaliser. Le chemin est long quand on boîte.

Dans cette boîte cohabiteront divers objets-livres participant d’un univers nocturne cohérent. Le premier élément ayant vu le jour dans la nuit est le livre La nuit, les arbres.

D’autres suivront ; la Boîte leur offrira finalement un réceptacle.

 

Les petits traits, et la nuit

Ça a débuté comme ça.[1]

Première est la nuit … et le désir commun d’explorer l’espace de la nuit.

Chacun avec ses outils y avait fait quelques incursions. Pour autant une communauté d’exploration ne se réduit pas à une juxtaposition d’expériences individuelles complaisamment regroupées pour la circonstance. Il a fallu qu’une pratique commune s’impose à nous pour qu’une porte s’ouvre et entrer enfin de concert dans ce territoire. Une pratique bifrons comme Janus, dieu des commencements et des fins, des choix, des clés et des portes.

Pratiquer les « petits traits ». Le chemin se crée en marchant, un pas après l’autre. Un trait après l’autre, des espaces naissent, certains très graphiques, d’autres tout en textures. Possibles ouverts.

Un trait suffit pour y entrer. Un trait suffit pour en sortir. Un pas de côté… qui peut être celui de l’autre, venant dérouter un cheminement.

L’espace de la détermination, du choix, de l’orientation, se situe dans l’entre-deux-traits, comme entre l’inspir et l’expir, dans la tension qui se crée après un trait et que le suivant peut poursuivre, amplifier, réduire, ou rompre tout à fait.

… et ainsi de suite … le choix d’un instant est remis en jeu par le trait suivant.

 

Chemin faisant, nous avons exploré les possibilités de cette pratique, mis nos petits traits à l’épreuve d’espaces variés, accumulé les expériences … Il fallait qu’un cycle prît fin et pour cela relier nos pas : en faire un livre, et à travers lui nous relire.

Il étrait une fois[2]

Une fois le livre relié, sa lecture révéla un itinéraire. Celui d’une longue marche d’approche, durant laquelle nous avions entraperçu des fragments de nuit, et qui nous avait ramenés à notre point de départ, avec ce même désir, sur ce même seuil. À ceci près que cette fois, la porte est ouverte, et un sol s’est constitué, permettant d’atteindre ce qui se devine, se dessine et se déploie au-delà.

Notre nuit est multiple.

Les « petits traits » en génèrent des dimensions. Il ne s’agit plus d’un trait qui en entraîne un autre, mais d’un espace qui en ouvre d’autres. Espaces mentaux mais prenant corps dans des objets concrets qu’il faut aussi pratiquer, inventer : livres d’artiste et livres-objets à géométrie aussi variable que la nuit.

Et parce qu’il y a nécessité de quelque chose qui retienne cette nuit protéiforme, d’un contenant pour cette pâte travaillée de potentialités de formes, êtres, mouvements et atmosphères, il nous faut, aussi, une boîte.

Une boîte à trésors ou une boîte de Pandore – car on ne sait ce qui peut en sortir – dans laquelle et par laquelle différents éléments se déploient et cohabitent, mais qui laisse du jeu : l’espace du dialogue, le vide nécessaire à la constitution d’un univers.

Une boîte de jeu (de mots, d’échos).

Une boîte de nuit.

 

Dans la Boîte

Faire des petits traits prend du temps, et fabriquer les objets où s’expriment des espaces complexes demande tâtonnements et expérimentation. Créer cette boîte de nuit et donner corps à tout ce qu’elle recèle sera sans doute un travail de plusieurs années.

Une forêt, probablement habitée ;
une épicerie de nuit (tout pour votre bouillon de sorcière) ;
les nocturnes, habitants de la nuit : dormeurs et rêveurs,
noctambules de plus ou moins bon augure,
animaux nyctalopes, guides ambigus ;
une marche de nuit, une ville la nuit ; une carte du ciel ;
un train de nuit et une incontournable gare de fou ;

s’y trouvent en gestation.

Si certains objets ne sont encore que des intuitions floues, nous en voyons d’autres prendre forme, et d’autres encore qui se concrétisent. Contenant et contenu se travaillent mutuellement.

Ainsi « la Forêt » prend la forme d’un long accordéon
déployant un panorama sylvestre,
dont les panneaux coïncident pour composer plusieurs forêts possibles,
c’est à dire plusieurs occasions de s’égarer.
« Les Hiboux », celle d’un petit livre-objet
où deux volatiles tiennent d’étranges propos
dans un jeu d’échos, de calques et de rabats.
la Marche de nuit, petit film d’animation pour un rêve déambulatoire.

Travailler la nuit ?

Plonger dans la nuit comme dans un élément, en explorer les différentes profondeurs, les plis et replis, les remous et autres trous noirs qui entraînent vers les abysses.

Travailler la nuit comme océan, l’océan comme nuit. Naviguer de l’un à l’autre. Chercher par quels agencements de plis et de plans, par quelles combinaisons de transparences et de perspectives, un objet-livre, au sens le plus libre du mot, pourrait donner à voir et à toucher densité et fluidité, surface et profondeur…

L’eau et la nuit sont liées et les champs symboliques et imaginaires de la nuit et de l’océan se recoupent. Dans les profondeurs de la nuit comme dans celles de l’océan, d’étranges créatures apparaissent, visions de féérie ou de cauchemar.

Idée de fond commun et d’origine, d’indistinction primordiale d’où surgissent la vie et certaines formes de savoir. Remontant du fond des âges, de la nuit des temps que nous avons en partage, réminiscences et anamnèses viennent éclore comme des bulles à la surface.

Indissociable de l’idée de mémoire est celle du mouvement qui en parcourt les étranges étagements. Revenants et revenances, flux et reflux, le ressac ressasse.

Le thème de la forêt s’est imposé naturellement. L’entrelacement des branchages répond à l’entrelacement des flux (d’eau, d’air, de magie).

Océan, forêt, nuit… autant de lieux propices à la confusion (la nuit, tous les poissons gris), à l’égarement (les sentiers qui bifurquent), aux métamorphoses, à d’étonnantes rencontres.

 

[1] Voyage au bout de la nuit – Céline

[2] Il étrait une foisŒuvres à quatre mains – Belem Julien et Mathieu Schmitt, éditions Xürübila, avril 2013

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